Sur les pistes de ski ou sur les routes, les dangers de l’éblouissement

Ces dernières années, les communications sur la lumière ont surtout mis l’accent sur les effets pathologiques. Si les effets des carences de lumière sont souvent évoqués au sujet de la conduite nocturne, les effets inverses d’un excès de lumière sont surtout abordés sous le biais du rayonnement invisible, des UV en particulier, toxiques à court et long terme. Mais qu’en est-il de la lumière visible ? La saison des sports d’hiver est, pour l’AsnaV, l’occasion de rappeler les effets de l’éblouissement.

Quand parle-t-on d’éblouissement ?

Ce n’est un secret pour personne, nos capacités visuelles dépendent essentiellement de la sensibilité de nos cellules photoréceptrices : les cônes, de jour, voient détaillé et coloré et nos bâtonnets, de nuit, ne sont sensibles qu’aux mouvements et au noir et blanc. Notre réflexe photomoteur adapte la quantité de lumière qui impacte notre rétine. Cependant, l’œil n’est pas un système optique parfait. L’inhomogénéité des milieux transparents produit la diffusion de la lumière. L’éblouissement est une perte de la performance visuelle ou encore la gêne éprouvée en raison d’une luminance dans le champ visuel supérieure au niveau d’éclairement auquel les yeux sont adaptés.

L’éblouissement peut provenir d’une source lumineuse directe, l’éclairage, ou indirecte, par réflexion de la lumière sur une surface, l’éclairement. Néanmoins, l’éblouissement demeure une difficulté d’adaptation à un changement brutal de lumière. Ainsi, si l’éblouissement s’entend en quantité de lumière, il s’entend aussi et surtout en qualité. La même lumière peut être confortable si elle est homogène et diffuse, mais invalidante si elle est ponctuelle et brutale.

  • L’éblouissement de diffraction se produit lorsque la lumière ponctuelle et périphérique est reflétée sur une surface optique de l’œil (cornée, cristallin ou corps vitré). Cela se traduit par la présence de halos qui se forment autour des lumières brillantes surtout en luminosité faible (la nuit ou derrière des verres solaires). Cette sensation produit une gêne qui finit par fatiguer le sujet mais n’altère pas ses performances.
  • L’éblouissement incommodant se produit lorsque le flux lumineux dépasse 3 000 lumens et surtout lorsque la lumière n’est pas homogène dans le champ de vision (c’est souvent le cas lorsqu’un poste de travail est mal éclairé). Il existe plusieurs symptômes de perturbation dont le plus fréquent est l’asthénopie. La fonction visuelle n’est pas impactée, mais le sujet se plaint plutôt d’un inconfort qui se révèle par des yeux lourds, qui piquent, qui brûlent.
  • L’éblouissement neutralisant, au-dessus de 10 000 lumens, brouille voire entrave la vision. L’acuité visuelle est maintenue, mais la vision des contrastes (vision des nuances et des ombres) et des reliefs est altérée. Il devient alors difficile d’éviter un obstacle, surtout sur une surface claire.
  • L’éblouissement aveuglant intervient lorsqu’une source de lumière intense apparait dans le champ de vision. Soit lorsque la lumière est isolée sur un fond foncé (flash d’appareil photo ou sortie d’un tunnel) mais surtout lorsque la lumière incidente se reflète sur des surfaces lisses et brillantes (l’eau ou la neige). Ce type d’éblouissement bloque temporairement la vision et le sujet ne voit plus. Après un éblouissement aveuglant, la récupération peut prendre 30 à 40 secondes, délai qui augmente avec l’âge. Sur une piste de ski, à 35 Km/h, on aura parcouru 300 mètres !

Comment l’éblouissement affecte-t-il l’œil normal ?

Étant donné que l’éblouissement dépend de la diffusion de la lumière à travers les milieux transparents, toute anomalie ou inhomogénéité du segment antérieur augmente davantage la diffusion intraoculaire de la lumière et entraine un accroissement de la sensibilité à l’éblouissement. C’est le cas des astigmatismes non compensés, des chirurgies réfractives ou des cataractes débutantes. Sans altérer les acuités visuelles du sujet, ces dernières se traduiront souvent par un seuil de sensibilité plus élevé.

De la même manière, les effets secondaires de traitements médicamenteux, comme les psychotropes et les antihistaminiques, mais aussi l’âge peuvent affecter l’efficacité du reflexe pupillaire et altérer la résistance à l’éblouissement.

Enfin, toute atteinte physio-pathologiques des photorécepteurs majorera ou anticipera ces effets. C’est le cas de l’âge et de la DMLA.

Le rôle essentiel de l’opticien 

La première précaution, face à l’éblouissement, est d’éliminer la diffraction des dioptres lorsque c’est possible. Tout astigmatisme, même s’il n’altère pas l’acuité visuelle doit donc être corrigé en solaire. Lorsque la cause n’est pas améliorable, l’instinct demande de réduire la quantité de lumière qui entre dans l’œil, soit en rendant la lumière homogène, c’est le cas des verres polarisés, soit en réduisant sa quantité avec des verres filtrants teintés.

Mais attention, si le filtre est mal choisi et que la luminance résiduelle est inférieure au seuil de fonctionnement des cônes, le système visuel passe en “vision nocturne”. L’enchaînement des mécanismes oculaires aura pour effet une chute de l’acuité visuelle évaluée de 1 à 5/10, une augmentation du temps de récupération à l’éblouissement et une perte de la vision des reliefs, du champ visuel et des couleurs.

Si l’on donne un exemple classique, un verre de classe 4 ne laisse passer que 3 à 5 % de la lumière. Utilisé sur une piste de ski, il fait passer la luminance de 12 000 à 360 lumens, parfait ! Mais utilisé sur l’autoroute, il fait passer la luminance de 6 000 à 180 lumens, c’est la luminance d’un clair de lune, pas suffisante pour garantir l’acuité visuelle optimale. C’est pourquoi, ces verres sont fortement déconseilles pour la conduite automobile.

La plus-value de l’optique est donc de fournir un équipement qui non seulement protégera le système visuel à long terme des effets pathologiques des UV, mais aussi adaptera l’équipement au client et à ses besoins. Cet exercice n’est jamais réalisé dans les magasins de sport !